Les défis de la logistique des produits agricoles, Simplifier la complexité et minimiser les risques
La sécurité alimentaire est une question vitale pour tous les pays du Monde. Elle dépend de l’activité agricole du pays et de son industrie agroalimentaire mais aussi de ses importations des produits alimentaires à partir d’autres pays. Dans les trois cas, la logistique est au centre des opérations pour simplifier la complexité et minimiser le risque : une mission dont dépendent, désormais les vies humaines.
La Banque mondiale et d’autres institutions ont récemment réexaminé les chaînes d’approvisionnement des corridors et les politiques et mesures pratiques visant à améliorer leur performance afin de relier plus efficacement les pays aux marchés. La logistique sur les corridors dépend de trois piliers.
Le premier est l’infrastructure, principalement routière ou ferroviaire reliant les principaux centres économiques et les ports, ainsi que reliant les zones rurales aux principaux corridors internationaux, et le stockage.
Le deuxième est le marché des services logistiques privés.
Le troisième est l’environnement réglementaire et les procédures qui permettent de transporter des biens, en particulier des produits alimentaires, au-delà des frontières, ce qu’on appelle la gestion du transit et des frontières.
Les retards d’importation le long des corridors dans les régions moins développées comme l’Afrique varient considérablement d’une semaine en moyenne (Afrique australe par exemple) à plusieurs semaines (Afrique centrale, par exemple), mais de façon encore plus marquée. Les coûts de logistique supportés par le consommateur peuvent parfois dépasser 100 % du coût du produit. Un manque de fiabilité tout au long de la chaîne d’approvisionnement découle des inefficacités dans ces trois défis principaux, et des difficultés à mettre en oeuvre les mesures correctives, souvent dans plusieurs pays.
Le premier défi : l’infrastructure
L’infrastructure de stockage est une composante indispensable des chaînes d’approvisionnement agricoles. Cela est dû au fait que la récolte se déroule normalement sur de courtes périodes alors que la consommation est étalée sur une année. Le stockage est donc inévitable tout en étant l’une des principales sources de risque dans la chaîne d’approvisionnement. Le risque provient des pertes au stockage ainsi que du coût d’opportunité du capital immobilisé.
Dans un marché géographiquement dispersé, les prix des aliments augmentent à mesure que la distance par rapport au marché augmente parce que les coûts de transport augmentent.
Par conséquent, le coût du stockage diminue à mesure que la distance au marché augmente. Au centre du stockage est le fait que l’appréciation du prix net des coûts de stockage devrait égaler le taux de rendement de la détention du stock. Cependant, dans la plupart des cas, les preuves indiquent ce que l’on a appelé le «paradoxe du stockage à perte». L’écart entre les prix au comptant actuels et futurs est normalement inférieur au coût de stockage. Cela a pour effet de forcer les agriculteurs, en particulier les petits, à vendre leurs produits dès leur récolte. Par conséquent, l’emplacement d’une installation de stockage ou d’un centre de traitement agricole détermine s’il vaut la peine que les producteurs vendent leurs produits ou non. Cela affecte tous les produits, mais est encore plus critique pour ceux qui sont hautement périssables, tels que la nourriture.
Une perspective de l’ensemble de la chaîne est donc essentielle pour équilibrer la fiabilité du transport et l’emplacement et la taille des installations de stockage.
Le deuxième défi : Le risque management
La fourniture de services est une source majeure de risque et plus complexe dans le contexte de la logistique alimentaire qu’ailleurs. Les risques associés aux services logistiques sont particulièrement importants pour les produits agricoles périssables ou pour les produits pour lesquels la livraison rapide sur le marché constitue un élément clé.
Par exemple, les risques de perte de qualité du produit dus à une défaillance de la logistique sont élevés pour le commerce des agrumes, des légumes, des viandes, du lait et ses dérivés. Ils sont moins importants pour les biens échangés en vrac, tels que le blé, le riz, le tabac et le sucre, où la volatilité des prix, par exemple, représente souvent le plus grand risque.
Le troisième défi : la facilitation des procédures
La facilitation du commerce et du transit est un autre sujet de préoccupation. La chaîne d’approvisionnement est presque partout une série de procédures de dédouanement dupliquées par les douanes et les bureaux de passage à chaque frontière terrestre jusqu’au pays de destination. Cette séquence provoque une grande partie des retards et des majorations par rapport aux coûts de transport.
Par rapport aux marchandises non alimentaires, le commerce des céréales et d’autres produits alimentaires est soumis à plus de contrôle réglementaire, dont le plus important est la réglementation sanitaire. D’autres mesures non tarifaires concernent souvent le commerce des produits alimentaires (par exemple l’octroi de licences, des quotas d’importation etc…).
Cependant, les importations et les exportations sont souvent organisées par de grandes institutions sur la base de contrats répétitifs et avec des volumes élevés. Ces entreprises ont développé une expérience pour gérer cette bureaucratie et limiter le risque d’interruption bureaucratique le long de la chaîne d’approvisionnement. Mais ce n’est pas le cas pour les petits commerçants pour lesquels la complexité est en effet plus grande pour les flux transfrontaliers. Ces opérateurs tentent de répondre aux opportunités locales du commerce alimentaire, où l’imprévisibilité du dédouanement et le comportement hostile à l’importation peuvent entraîner de sérieux dommages (retards et pertes), même sur des distances relativement connues.
Par ailleurs, la fluidité administrative et la complexité bureaucratique lors du dédouanement, dépendent beaucoup des positions politiques des pays entre eux et de la qualité de leurs relations bilatérales. Le paradoxe peut être que le commerce entre les pays voisins d’un produit peut être plus complexe que celui des mêmes produits avec un autre continent.