La ruée vers les hubs
La capacité dans les ports maritimes et les aéroports du Moyen-Orient croît plus vite que le commerce régional, mettant en péril la viabilité de milliards de dollars de nouveaux investissements dans les infrastructures de transport. L’investissement que les gouvernements affectent dans la logistique et les transports régionaux a pris son envol dans la dernière décennie, tiré par les pays arabes du Golfe riches en énergie qui tentent de se tailler une place de hubs commerciaux entre l’Afrique et l’Asie, comme l’a rapporté Dow Jones Newswires. Dubaï, ville située au bord sud du golfe, a été une plaque tournante régionale pour longtemps. Son port de Jebel Ali représente environ la moitié de la capacité portuaire de la région-mais beaucoup de ses voisins vont maintenant essayer d’utiliser leur richesse pour copier son succès. Selon John Manners-Bell, le directeur de la recherche du cabinet de conseil Transport Intelligence, cette vague d’investissements dans des endroits comme Abu Dhabi, dans les Émirats arabes unis, Doha au Qatar et Djeddah en Arabie Saoudite, est susceptible d’augmenter la capacité régionale des ports de 40 millions d’EVP par an à 100 millions d’EVP dans les 10 à 15 prochaines années. La capacité de chargement des aéroports devrait augmenter de huit millions de tonnes par an à 14 millions en 2020. Or, selon Manners-Bell, le problème est que le commerce devrait croître d’environ 10 % par an pour rentabiliser cette capacité. Bien que les taux de croissance aient été élevés dans certains ports régionaux au cours des dernières années (comme cela était le cas du volume du port de Salalah à Oman, par exemple, qui a augmenté de 6,5 % l’an dernier), l’expansion semble être insuffisante pour combler la capacité à venir. Dans ces sens, Manners-Bell a déclaré que ‘‘La planification des capacités au Moyen-Orient
est dysfonctionnelle. Cette région n’est pas coordonnée,
ajoute-t-il, et il est également mal gérée, ce qui conduira à augmenter la capacité au mauvais endroit. Ils ne veulent pas avoir assez de volumes pour rentabiliser ces ports ou ces aéroports. Le défi de la capacité constitue un enjeu fondamental pour le Golfe, où les pays ont longtemps été réticents à établir des stratégies économiques conjointes ou de coordonner leur développement malgré des structures économiques similaires et la proximité géographique. Une monnaie commune du CCG prévue a été rejetée lorsque l’UAE s’est retiré en 2009 en raison des différences avec l’Arabie saoudite sur le lieu du siège de la future banque centrale régionale. Une union douanière visant à uniformiser les tarifs de la GCC a été bloquée pendant plus d’une décennie, en raison de divergences sur le partage des revenus. Si la capacité a continué à croître plus vite que le volume des échanges, Manners-Bell estime que la région était de nature à stratifier en deux niveaux. Il y aura un premier niveau de méga-hubs comme Dubaï, dit-il, avec un grand nombre de hubs de second rang qui servent les sous-régions ou des pays isolés. D’autres risques apparaissent si de nouveaux centres en Afrique et en Inde émergent et rivalisent avec certaines des hubs en cours de développement au Moyen-Orient. Pour Manners-Bell, ‘‘il y a beaucoup de risques dans cette démarche’’. ‘‘En copiant simplement Dubaï, je ne crois pas que ces autres États ont une analyse de rentabilisation véritable pour les capacités qu’ils projettent. Le vrai danger est que cette capacité se retrouve au mauvais endroit’’, a-t-il expliqué.